Pour
rappel, la dation en paiement est un mécanisme juridique permettant au débiteur
d’une dette de payer celle-ci en transférant la propriété d’un bien lui
appartenant à son créancier qui l’accepte. Dans le cas de la dation d’œuvres
d’art, le créancier est l’Etat, la dette est une dette fiscale et le débiteur
est le propriétaire, par exemple les héritiers d’un artiste ou d’un
collectionneur.
La
Belgique utilise cet outil depuis des dizaines d’années (1985)[1].
Il est cependant limité au paiement d’une seule taxe : les droits de
succession. A titre de comparaison, en France, non seulement le mécanisme
existe depuis plus longtemps (1968), mais il est également plus permissif
puisque plusieurs taxes peuvent être payées de la sorte : les droits de
mutation à titre gratuit (les droits de succession, les legs et les donations),
les droits de partage, et même l’impôt sur la fortune (ISF).
Les
raisons qui ont poussé la France et la Belgique à agir de la sorte sont
simples : il permet à l’Etat[2] de
conserver et de préserver des œuvres d’intérêt artistique, technique et/ou
culturel sur son territoire au sein d’institutions spécialisées que sont les
musées. Du point du vue des héritiers d’œuvres de qualité, il arrive que les
droits de succession soient élevés – notamment compte tenu du succès de l’artiste
décédé ou de l’ampleur d’une collection léguée par exemple – sans que la
succession ne reçoive de liquidités suffisantes pour les acquitter. Sans une
dation, elle n’aurait d’autres choix que de procéder à la vente de certaines pièces
pour s’acquitter de la taxe… Au final, tout le monde s’y retrouve : l’Etat
veille au bien commun en permettant aux citoyens d’accéder à ce patrimoine,
alors que les héritiers s’acquittent d’une taxe due même en l’absence de
liquidités.
Les
illustrations ne manquent pas : L’origine
du monde de Courbet constitue une excellente mise en pratique pour la
France alors que l’exceptionnelle collection Janssen d’objets d’art
précolombien en constitue une autre pour la Belgique.
Cependant,
le contribuable doit passer par une procédure divisée en 3 phases qui, dans
certains cas, s’est avérée longue et usante : dans un premier temps, il s’agit
de préparer et déposer la demande de dation dans les 4 mois suivants le décès. Le
dossier est ensuite analysé par l’administration et – surtout – par une
commission spécialisée composée d’experts en art, et de représentants des
entités fédérées concernées². Enfin, si la procédure arrive à son terme, le
transfert de propriété de l’œuvre doit être concrètement effectué, celle-ci
devant être remise au musée désigné par l’Etat.
La
Belgique a prévu que les frais d’expertises, s’il y a lieu, restent à la charge
du contribuable tant que la dation n’est pas finalisée. Il s’agit d’éviter de
la sorte que le candidat n’en profite pas pour faire expertiser une œuvre aux
frais de l’Etat et décider en fin de procédure de retirer sa demande en
refusant la valeur proposée par la commission.