La Belgique est un lieu où se
tiennent régulièrement les foires d’art. Une des dernières en date était l’affordable art fair où l’amateur d’art a
pu se transformer en acheteur. Celui-ci bénéficie de certains droits sur l’œuvre
achetée. Mais il est également confronté à une série d’obligations légales
qu’il ne peut négliger durant sa possession et même plus tard lors d’une
éventuelle revente. Ses obligations constituent autant d’écueils plus ou moins
connus auxquels il doit prendre garde. En voici quelques exemples
non-limitatifs afin de permettre à l’amateur éclairé de les éviter.
Liberté contractuelle vs droits intellectuels
Généralement, on dit d’un
propriétaire qu’il peut user et abuser de son bien. Mais les droits résultant
de l’acquisition d’une œuvre d’art sont en partie contrebalancés par les droits
de l’auteur de l’œuvre acquise. Autrement dit, l’auteur continuera à bénéficier
de certains de ses droits et ce même
après la vente de son œuvre !
Le contrat de vente est soumis en
principe à la liberté contractuelle. Seulement, une fois de plus en cas d’achat
d’œuvres d’art, cette liberté est limitée par les droits intellectuels de
l’artiste. Ils se divisent entre les droits moraux et patrimoniaux. Bien que le
propos doit être fortement nuancé, on dit des droits moraux (comprenant le
droit de choisir le moment de la divulgation de l’œuvre, le droit de paternité
sur l’œuvre et le respect de son intégrité) qu’ils sont inaliénables tandis que
les droits dits patrimoniaux (comprenant par exemple le droit de reproduire
l’œuvre) peuvent être cédés.
Le respect de l’œuvre et son exposition
Nous venons de voir qu’un des
droits moraux de l’artiste est son droit au respect de l’intégrité de sa
création, ce qui lui permet de s’opposer à toute modification, mutilation ou
dénaturation de celle-ci. Hors de question pour le propriétaire de démanteler
en plusieurs fragments une sculpture composée de plusieurs éléments ou de
porter atteinte à sa substance par une quelconque modification. Par contre, il
a le droit de jouir de l’œuvre et de la revendre.
Le droit d’exposition de l’œuvre
est également encadré puisque le propriétaire ne peut que l’exposer telle
quelle en la présentant dans des conditions non préjudiciables à l'honneur ou à
la réputation de l'auteur. Néanmoins, les parties peuvent contractuellement y
déroger.
Enfin, la reproduction du travail
de l’artiste est également limitée et nécessite en tout cas son autorisation. Il
disposera également du droit d’accéder à son œuvre afin d’exercer ses droits
patrimoniaux, notamment pour la filmer et la photographier. Dans la pratique,
ce droit est régulièrement mis en œuvre par l’artiste, par exemple, dans le
cadre de la confection d’un livre lors d’une rétrospective.
Le cas de la revente de l’œuvre
La revente d’une œuvre soulève de
nouvelles questions. Cette opération, ne concernant a priori que le
propriétaire et le futur propriétaire, a pourtant des conséquences juridiques
pour l’auteur de la composition. Elles se matérialisent par le droit de suite
attaché à l’œuvre. En vertu de ce droit, l’auteur d’une œuvre plastique ou graphique
pourra percevoir un pourcentage sur le prix de revente dès qu’un professionnel
du marché de l’art intervient. Ce droit se justifie par la volonté de maintenir
en faveur du créateur un certain niveau de revenu. Il est d’autant plus
important que la valeur de la création peut avoir augmenté en même temps que la
renommée de l’artiste.
Ces quelques éléments ne font
qu’illustrer le propos et comportent autant d’exceptions que de spécificités.
L’acquéreur doit également tenir à l’œil les questions de l’assurance de
l’œuvre, du transport de celle-ci, de sa reproduction ou de son prêt, … Elles
constituent autant de nouvelles problématiques en droit auxquelles l’acheteur
songera et surtout se renseignera.
Alexandre Pintiaux,
Avocat au Barreau de Bruxelles.