L’incertitude actuelle quant au Brexit n’empêche pas d’identifier déjà les impacts qu’il aura sur le marché de l’art et le secteur culturel. Analyse.
A ce stade, les conséquences seront plus ou moins fortes en fonction de la tournure que prendra l’actualité dans les prochaines semaines. Typiquement, deux cas de figures sont possibles, à savoir la sortie du Royaume-Unis sans accord ou avec accord, auquel cas nous pouvons nous baser sur les négociations tenues entre Theresa May et Christophe Barnier. En effet, même s’il est évident que cet accord a du plomb dans l’aile, il n’en reste pas moins une possible base qui sera, le cas échéant, amandée du fait des retards dans la mise en œuvre du Brexit. A cet égard, cela reste, selon nous, un outil précieux.
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Nous avons identifié 5 thèmes qui seront inévitablement soulevés au sein du marché de l’art et du secteur culturel, à savoir :
- la situation quant aux droits intellectuels et essentiellement le droit d’auteur et le droit des marques,
- la libre circulation des travailleurs dont 30 à 40 % des emplois sur le marché de l’art au Royaume-Unis seraient occupés par des travailleurs européens selon le Journal des Arts (nov. 2016),
- les conséquences du Brexit sur les contrats en cours, notamment en cas de prêt d’œuvre d’art ou de vente ;
- Et évidemment les conséquences sur la libre circulation des œuvres d’art, sujet déjà sensible avant même qu’il ne soit question du Brexit, dont le droit européen est particulièrement cadenassé.
- Enfin, nous nous poserons la question des opportunités que représente le Brexit pour le marché de l’art outre-Manche.
Nous les examinerons dans nos prochaines chroniques en détail, vu l’importance de la matière.
Droits intellectuels et Brexit
Bien évidemment, l’ensemble des droits intellectuels sont potentiellement impactés par le Brexit. Nous nous limiterons cependant à examiner les deux cadres juridiques les plus courant pour le marché de l’art et le secteur culturel que sont le droit des marques et la protection des créations par le droit d’auteur.
C’est que la réponse au Brexit peut être différente suivant le droit intellectuel impliqué.
Les marques enregistrées
Qu’adviendra-t-il des marques européennes, enregistrées sur base du droit européen et qui sont actuellement applicables au Royaume-Uni ? La question n’est pas anodine.
En cas de Brexit dur, cela signifierait que le pays se désolidariserait de l’ensemble de la législation européenne. Il y a donc un risque élevé que les marques européennes ne soient plus reconnues sur ce territoire.
En cas de Brexit soft, la solution a heureusement été prévue dans l’accord négocié avec Theresa May. Dans ce cas, le titulaire d'une marque de l'Union européenne enregistrée conformément au règlement européen devient titulaire d'une marque au Royaume-Uni, constituée du même signe, pour les mêmes produits ou services.
Imaginons les célèbres marques de galeries d’art de Bruxelles qui seraient particulièrement actives à Londres. Dans ce cas, aucune démarche complémentaire ne sera nécessaire pour maintenir la protection de celles-ci sur place.
Solution sage et efficace s’il en est… En cas de Brexit structuré !
Droit d’auteur
Les règles relatives aux droits d’auteur sont sensiblement différentes. Seuls certains aspects sont dictés par l’UE, alors que chaque état membre disposait déjà, avant la création de l’UE, de règles visant à protéger les créations littéraires et artistiques.
Pour l’Angleterre, il s’agit du célèbre copyright qui continuera à être appliqué, alors que pour la Belgique, il s’agira toujours de la protection par les règles propres aux droits d’auteur.
Au niveau international, la matière est réglée par un traité dont le Royaume-Unis et la Belgique sont signataires. Il prévoit notamment la règle du traitement national, à savoir le fait que la victime belge d’une atteinte à ses droits sur le territoire anglo-saxon y bénéficiera de la même protection que les nationaux sur place, l’inverse étant prévu au bénéficie des citoyens anglais sur notre territoire.
Comme il s’agit d’un traité en dehors de l’UE, son application par nos voisins ne devrait aucunement être impactée. Il s’agit donc d’un statut quo sur cette question.