Quel régime fiscal est applicable lorsqu’un particulier, collectionneur ou simple amateur d’art, décide de se défaire d’une œuvre qu’il détient. Analyse.
En France, le régime fiscal est bien connu. Un impôt doit être payé !
En effet, l’hexagone applique une taxation sur les plus-values générées lors de la revente d’une œuvre d’art par des particuliers. Une autre option, laissée à l’appréciation du contribuable français, lui permet d’appliquer un taux d’imposition forfaitaire, non pas sur la plus-value dégagée, mais bien sur le prix de vente total. Dans les deux cas, le fait d’agir en dehors d’un cadre professionnel n’est pas relevant.
Amis collectionneurs français : à vos calculettes ! Mais qu’en est-il pour la Belgique ?
Distinction entre les extrêmes…
Comme souvent en matière fiscale, il nous faut procéder à une distinction de bon sens entre la personne qui agit à titre professionnel et celle qui agit à titre strictement privé.
Evidemment, un professionnel du secteur (par exemple un marchand d’art indépendant, ou un intermédiaire sous statut d’indépendant complémentaire) qui achète une œuvre pour la revendre agit dans un cadre professionnel. Comme toute activité professionnelle, il est taxé en conséquence à titre de revenu professionnel à l’impôt des personnes physiques. La taxe qu’il payera in fine dépendra du bénéfice qu’il aura dégagé, déduction faite des frais exposés pour les obtenir.
Si notre marchand n’agit pas sous le statut d’indépendant mais à travers une société, cette dernière sera taxée sur son bénéfice à l’impôt des sociétés.
Ces éléments caricaturés constituent les rudiments de la matière. Inutile de s’y attarder.
A l’inverse, celui qui agit dans le cadre de la gestion de son patrimoine privé bénéficiera d’une fiscalité très avantageuse. Et pour cause, puisqu’elle ne prévoit – en principe - aucune taxation.
Imaginons un amateur de bandes-dessinées. En 2000, il a acheté une magnifique planche originale d’E. P. Jacobs. En 2019, il décide de la revendre à un prix 20 fois supérieur à son prix d’achat. Même si la valeur de ce type de création aura clairement augmenté, et qu’il matérialise lors de la revente une plus-value évidente, il ne sera purement et simplement pas taxé.
Bonne nouvelle pour les collectionneurs nationaux, surtout lorsque nous les comparons à leurs homologues français. Cependant, quelques nuances doivent être apportées. Qu’en est-il en cas spéculation active ? Si l’œuvre n’a pas été achetée il y a 20 ans mais il y a 3 ans ? Et s’il fait régulièrement ce genre d’opération ? La solution peut être drastiquement différente, et donc plus douloureuse (fiscalement parlant). Il est possible que l’opération soit taxée, non pas à titre de revenus professionnels, mais à titre de revenus divers.
Collectionneurs : vous revendez une œuvre d’art et la plus-value s’envole… Pas de panique ! Source: shutterstock |
La gestion normale d’un patrimoine privé
Afin de mesurer ce risque de requalification, il convient d’examiner les conditions à remplir afin de considérer que notre revente puisse bien être considérée comme une gestion normale d’un patrimoine privé. C’est le critère retenu par la loi.
Le concept de gestion normale fait référence au comportement qu’aurait un bon père de famille, à savoir en ne prenant pas des risques anormalement élevés, et évidemment sans lien avec une activité professionnelle.
Selon nous, en cas de spéculation évidente, par exemple lors d’un achat suivi d’une revente rapide avec une plus-value, le contribuable concerné risquerait de voir cette plus-value imposée à titre de revenus divers. Si ce type d’opération est régulière, l’ombre de l’imposition ne fera que croitre, avec même un risque de requalification à titre de revenu professionnel.
C’est toujours une appréciation de fait.
Si ce risque est réel pour quelques spéculateurs, une extrêmement grande partie des particuliers actifs sur le marché de l’art ne seront jamais concernés par ces considérations fiscales… et continueront à gérer leur collection en bon père de famille.