lundi 29 janvier 2018

Le droit de suite en France et en Belgique


France / Belgique

Les marchés de l’art belge et français s’entrecroisent régulièrement. De nombreux acteurs du marché sont actifs dans les deux pays. Dans le cadre de cette chronique, nous comparerons les deux régimes sur des thèmes tels que le statut de l’artiste, le mécénat, la fiscalité de l’art,...
A suivre jusqu’en 2018 tous les premiers mercredis du mois.


Le droit de suite est applicable dans toute l’Union Européenne. Analyse et comparaison de la France et de la Belgique.

C’est au début du XXème siècle qu
’apparaît le droit de suite en France dans un souci de protection des auteurs d’œuvres d’arts graphiques ou plastiques et de leurs ayants droits. 

Si au niveau international, tous les Etats n’appliquent pas ce mécanisme, il a été largement consacré en Europe, en 2001, avec l’adoption de la directive relative au droit de suite au profit de l’auteur d’une œuvre originale mais, malgré cette harmonisation importante, il existe encore quelques différences dans les systèmes nationaux, comme en France et en Belgique.

Définition du droit de suite 

Le droit de suite est le seul droit d'auteur réservé aux plasticiens

La mise en place de ce dispositif légal avait pour but premier d’assurer une participation économique des artistes plasticiens aux plus-values réalisées par les propriétaires de ces œuvres lorsqu’ils décidaient de les revendre alors que la cote de l’artiste avait pu monter entre temps. 


Plus précisément, un droit de suite est dû pour tout acte de revente d'une œuvre d'art originale dans lequel interviennent en tant que vendeurs, acheteurs ou intermédiaires, des professionnels du marché de l'art, après la première vente par l'auteur. Le droit de suite ne s’applique donc que sur le marché de l’art secondaire et prend la forme d’un prélèvement partiel (quelques pourcents) sur le prix de revente.

Le montant du droit de suite

Si les pourcentages sont identiques (décroissant de 4% à 0,25%), le seuil d’applicabilité de cette règle est différent entre la France et la Belgique.

En Belgique, aucun droit de suite ne s’applique pour un prix de revente inférieur à 2.000 EUR alors qu’en France, ce seuil est fixé à 750 EUR ce qui rend – par essence – ce régime applicable à un plus grand nombre d’artistes dans ce pays. 

Outre l’auteur qui va en bénéficier de son vivant, ses héritiers, pendant 70 ans après le décès de l’artiste, peuvent également en jouir. Mais qu’en est-il lorsque l’auteur souhaite léguer à une tierce personne ce droit ?

Le legs du droit de suite en Belgique 

Le législateur prévoit que les bénéficiaires du droit de suite est l’artiste vivant ou, en cas de décès, ses héritiers, ses ayants-droits ou la personne désignée comme bénéficiaire par l’auteur. 

Par conséquent, le droit de suite, tout comme les autres droits patrimoniaux de l’auteur, peut parfaitement faire l’objet d’un legs et ce, même en présence de descendants à la condition que la réserve légale des héritiers soit respectée. En Belgique, l’artiste peut donc choisir de léguer ce droit à une fondation ou à toute autre personne qu’il désigne, qu’il s’agisse d’un legs particulier ou legs universel, ce qui s’avère particulièrement souple.

Evolution en France 

Jusqu’ à récemment en France, le bénéfice du droit de suite était réduit aux seuls héritiers légaux, à l’exclusion des légataires (fondations ou titulaires du droit moral), et ce contrairement à la plupart des Etats qui laissaient la possibilité à l’auteur de léguer son droit de suite à la personne de son choix. 

Dans un passé récent, le législateur français a souhaité remédier à cette impossibilité de legs et permettre à un artiste de confier son droit de suite à toute personne, ce qui est maintenant prévu par la loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine, promulguée en 2016. 

Désormais, l’auteur peut transmettre son droit de suite par legs. Il est également prévu, qu’en cas d’absence d’héritier ou de légataire désigné par l’artiste, le droit de suite soit transmis au légataire universel ou au détenteur du droit moral de l’artiste.

Ainsi, un artiste qui désigne une personne pour recevoir l’intégralité de son patrimoine, ne pourra pas léguer son droit de suite à celle-ci, si subsiste un conjoint survivant ou un descendant. 


Dans la pratique, quel que soit le pays concerné, le droit de suite est souvent décrié par les professionnels du secteur et salué par les artistes et les héritiers, chacun veillant logiquement à ses propres intérêts.