Avec Ashkan SERENO
La transposition en droit belge de la dernière directive en droit d’auteur est l’occasion de faire le point sur la question des contrats.
C’est par la loi du 19 juin 2022 que la directive a été transposée au sein de la législation belge, laquelle a été publiée au mois d’août dernier. Parmi une multitude de règles figurent de nouvelles obligations en matière de contrat d’exploitation de droits d’auteur. Nous rappelons les principes de base en la matière dans les lignes qui suivent avant d’entrer dans les détails de la réforme dans notre prochaine chronique.
Protection des auteurs
La législation en matière de droits d’auteur intéresse les artistes plasticiens bien évidemment, mais plus globalement tous les auteurs actifs au sein du secteur culturel (musique, littérature, audiovisuel, arts de la scène, …), sans oublier les industries culturelles et créatives.
Historiquement, le législateur est parti du postulat que l’auteur – quelle que soit sa forme d’expression artistique – est la partie faible lorsqu’un contrat relatif à ses droits est négocié. A l’exception des grosses pointures qui ont acquis un pouvoir de négociation plus important du fait de leur succès, le fait de signer avec un label, un producteur, un éditeur, etc. implique souvent d’adhérer au contrat sans réellement pouvoir solliciter des adaptations.
Dès lors, tout comme dans la législation relative à la protection du consommateur, le législateur s’est attelé à contrebalancer cette réalité par une série d’obligations qui doivent apparaître dans la convention, et visant à encadrer le contrat (lequel est obligatoire) en vue d’informer l’auteur.
Contrairement à la pratique malheureuse du secteur, ce type de contrat ne devrait donc jamais laisser la place à l’improvisation et au bricolage. La première règle à garder à l’esprit porte sur l’interprétation des contrats. Si le contrat est clair : pas de problème. En revanche, si un article implique plusieurs sens potentiels, le code impose d’interpréter toujours la clause en question de la manière la plus favorable à l’auteur.
C’est ce qu’on appelle un réel garde-fou.
Licence ou cession ?
Souvent les difficultés surgissent dès le titre de la convention. Il est souvent utilisé de manière indifférente le terme « licence » ou « cession », qui sont les deux seuls termes que nous retenons car ils sont simples à appréhender (contrairement au terme « concession » moins précis selon nous).
Une licence implique que le contrat d’exploitation des droits d’auteur sera limité dans le temps. Cela doit apparaître dans la clause relative à la durée du contrat qui le limitera en conséquence : 1 jour, 1 mois, 5 ans, 20 ans… Tout est possible.
La cession de droit implique un transfert définitif du droit d’auteur. La clause relative à la durée précisera donc que les droits sont octroyés pour toute la durée légale (toute la vie de l’auteur + 70 ans). Au-delà, les droits tomberont dans le domaine public.
Licence et cession peuvent en outre être exclusives ou non. Nous pouvons valablement imaginer qu’une convention implique une cession (pour toute la durée légale du droit d’auteur) non exclusive ce qui autorise l’auteur à les céder… plusieurs fois ! C’est ce que l’on rencontre régulièrement en matière de photographie illustrative.
Mentions obligatoires
Enfin, le contrat implique la présence de 4 mentions obligatoires pour être valable à l’égard de l’auteur. Une de ces mentions est la durée, déjà évoquée. La deuxième mention porte sur le territoire couvert par la convention, pouvant varier du territoire le plus restreint à l’univers entier.
Les droits cédés doivent ensuite être expressément énumérés et explicités. Ceci doit permettre à l’auteur de mesurer l’ampleur des droits concédés.
Enfin, l’auteur doit identifier avec précision la contrepartie financière liée aux droits visés. Si c’est gratuit, cela doit donc être expressément précisé.
Les nouvelles règles publiées au mois d’août dernier ajoutent quelques éléments à cette réalité. Nous les parcourrons dans notre prochaine chronique.