Acquérir ou vendre une œuvre d’art reste une opération délicate. Afin d'identifier et évaluer au mieux un bien, le profane peut faire appel à l’œil expérimenté d’un expert. Une erreur n’est cependant jamais à exclure.
L’expert
Qu’il soit généraliste ou spécialisé dans une période de l’histoire de l’art définie, l’expert met ses connaissances et son expérience au profit d’amateurs ou de collectionneurs professionnels. En l’absence de statuts, tout un chacun est libre d’accéder à la profession sans formation spécifique. C’est ainsi que l’on retrouve parmi les experts en art des chercheurs, des commerçants ou encore de fins connaisseurs. Dans ce cadre, la valeur scientifique de l’expertise peut être toute relative.
La profession en tant que telle n’est pas réglementée, mais certaines associations d'experts se dotent de règles déontologiques auxquelles doivent satisfaire leurs membres et ce sous peine de sanctions.
Traditionnellement, l’expertise portera sur l’authenticité de l’objet visé et/ou sur la valeur de celui-ci.
L’évaluation
Après l’authentification, l’estimation est l’une des missions principales de l’expert. Le prix qu’il arrêtera à cette fin, ne représente qu’une idée approximative de la valeur du bien. Cette estimation doit être relativisée dans la mesure où le prix réel de l’œuvre est fixé, comme pour tous autres biens, par l’offre et la demande.
Dans le cadre des ventes publiques, l’estimation prendra la forme d’une fourchette de prix (évaluation basse et évaluation haute).
Obligation de moyens
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L’expertise reste aléatoire quant au résultat final. Que ce soit dans l’authentification ou l’évaluation, l’expert reste tenu par une obligation de moyens envers son client. Ce type d’obligation contraint le professionnel à mettre en œuvre les moyens possibles et raisonnables pour mener à bien sa mission (par opposition à l’obligation de résultat, qui contraint le professionnel à parvenir à un résultat déterminé, précis et fixé à l’avance, sous peine d’engager sa responsabilité).
Dès lors quand un expert s’engage à évaluer un bien, il est tenu à une obligation de moyens.
En règle générale, on estime que les experts n'ont pas l'obligation de procéder à des recherches dont le cout serait hors de proportion avec la valeur de l’objet. De plus, le caractère aléatoire de sa mission et l’utilité de celle-ci peuvent justifier un décalage important entre l'estimation et le prix en cas de vente. Enfin la réalité du marché fait que pour un même artiste, des prix sensiblement différents peuvent être rencontrés.
La personne lésée par l’évaluation erronée d’un expert devra, pour engager la responsabilité de celui-ci, démontrer qu’il a commis une faute (négligence ou imprudence) et qu’un dommage en a résulté.
Faute
L’estimation d’une œuvre n’est pas une science exacte et la jurisprudence belge publiée en la matière est, à notre connaissance, pratiquement inexistante.
La mise en cause d’un expert pour erreur d’évaluation par rapport au prix du marché n’est jamais aisée et dépendra des circonstances de fait. Notamment, la responsabilité peut être envisagée dans l’hypothèse où l’expert trompe intentionnellement le vendeur.
Dommage
L’erreur d’estimation, même inhérente au caractère aléatoire d’une expertise, peut causer un dommage au propriétaire du bien évalué. Dans le cadre d’une vente publique, la preuve d’un dommage sera plus difficile à apporter, la loi des enchères rétablissant en règle générale le potentiel déséquilibre. Il en va cependant autrement lorsque l’évaluation a pour objectif une opération de partage entre héritiers, une mise en gage ou encore lors d’une vente de gré à gré. Dans ces cas, l’erreur d’estimation peut être source d’un préjudice réel ou à tout le moins, s’il est prouvé, être la source d’un contentieux entre l’expert et les bénéficiaires de l’expertise.
Pour se prémunir contre ces éléments, nous ne pouvons que conseiller aux parties impliquées de convenir à l’avance des obligations de chacun, par exemple – pour l’expert – par la rédaction de conditions générales.